DE L'HUISSIER DU TRESOR
PUBLIC
HUISSIERS
DU TRESOR PUBLIC :
Nous en parlons depuis longtemps,
et nous avons beaucoup écrit sur le sujet ; à ce jour, les grands
changements annoncés ne devraient plus guère tarder. Normalement, ils auront
lieu au 1 ° janvier 2007.
Qu’on en juge, il ne s’agit
pas de peu de chose :
-le
régime indemnitaire, longtemps fondé sur un paiement à l’acte, disparaît.
Il est remplacé par le paiement d’une prime, partie fixe, partie variable. Il
s’agit d’une véritable révolution, qui va changer de manière radicale les
habitudes et les comportements professionnels des huissiers du Trésor. On se
rappellera opportunément le précédent des commissaires de police qui ont
connu une évolution semblable.
-le
régime statutaire subit lui aussi un changement fondamental, le corps des
huissiers du Trésor est fusionné avec celui des inspecteurs, avec les
avantages évidents qui en découlent au niveau du déroulement des carrières,
des grades de débouchés, des promotions par concours au grade d’inspecteur
principal, mais aussi avec, à terme, la perte de l’identité forte et de la
spécificité de la corporation.
-s’ajoutent
à cela les conclusions de la MAEC, qui vont dans le sens d’un large recours
aux huissiers de Justice devenus compétitifs en matière de coût. Elle ouvre
la voie à une privatisation partielle du Trésor Public, qui pourrait gagner
dans le futur les comptables, qui seraient mis en concurrence avec des cabinets
privés.
Pour l’instant et en ce qui nous
concerne, retenons que l’idée exprimée dès 2001 par M. MARIEL, de donner
une carrière aux huissiers du Trésor, mais en contrepartie d’en faire de
« vrais fonctionnaires », aura fini par aboutir. Il conviendra à
chacun d’entre nous d’en tirer les conséquences, d’élargir notre activité
au recouvrement contentieux, au conseil aux comptables après étude des
dossiers, et d’avoir une activité moins axée sur la production d’actes.
Notre métier devrait gagner en
intérêt intellectuel, et perdre son côté « profession libérale »
qui dérangeait tant de collègues dans le réseau.
Michel
DURAND
Le directeur général de la Comptabilité
Publique présidait, ce 15 mars 2006, une réunion comprenant plusieurs volets :
-
l’avenir
des missions des huissiers du Trésor Public
-
les
conclusions du rapport de la MAEC sur les coûts comparés des huissiers du Trésor
public et des huissiers de Justice
-
le
projet de décret relatif à l’exercice des poursuites
-
les
critères d’appréciation de l’activité des huissiers
On le voit, l’ordre du jour était
d’une toute particulière importance.
Ce rapport est attendu depuis longtemps,
et devait être publié à l’automne 2004 ; il s’est alors perdu dans
les tuyaux obscurs de la DGCP, pour ne ressurgir qu’en ce mois de mars 2006,
et encore sous forme d’un tableau synthétique. Qu’a-t-il fait pendant cette
longue année ? Nul ne le sait ! Sans doute se bonifiait-il comme le
bon vin en cave…
L’enquête réalisée par la MAEC
s’est déroulée pendant le premier semestre 2004, elle a exploité les réponses
à un questionnaire envoyé dans 17 départements, et à une intervention sur
place dans neuf départements. Elle a par ailleurs pris en compte les requêtes
informatiques concernant tous les actes encodés entre le 1° janvier et le 31
juillet 2004, soit 198000 saisies RAR et 309500 saisies AMD.
Les principales constatations
s’articulent autour des thèmes suivants :
a)
les
points forts :
- La rationalisation des poursuites,
rendue obligatoire par la déconcentration des crédits, qui a conduit à
recourir plus largement à l’ATD, à l’opposition administrative et aux
saisies attribution, et à ne plus payer les huissiers de justice à carnets
ouverts, mais à signer des conventions avec eux.
- La répartition le plus souvent
opportune des actes entre HJ et HTP, en tenant compte des coûts.
b)
les
points faibles :
- Les outils de suivi des performances
sont insuffisants.
- Les huissiers du Trésor sont en
situation de sous activité, 1800
actes en moyenne par an hors tentatives, avec des départements où cette sous
activité est très forte (10% de départements avec une moyenne de moins de
1000 actes annuels par huissier)
c)
le
coût des actes :
Pour les huissiers de Justice, le montant
payé diminue de 73 M€ en 1997 à 34 M€ en 2004, le nombre de saisies vente
est divisé par 4. Ils ne traitent plus que 10% des créances fiscales et moins
de 20% des produits locaux, produits divers et redevance.
Pour les huissiers du Trésor,
l’activité est hétérogène suivant les départements : la
moyenne de 1800 actes hors tentatives laisse apparaître 10% de départements
à moins de 1000 actes par an d’un côté, et 15% de départements à plus de
3000 actes.
Le coût moyen par acte ressort à 81 €
sur la base de 1000 actes, 47 € sur la base de 2000 actes, et 35 € sur la
base de 3000 actes annuels ; ces montants intègrent l’ensemble des coûts
que supporte l’Etat, et notamment ceux de la retraite.
En termes de comparaison, le coût moyen
d’un acte est favorable aux HTP pour les créances supérieures à 100 € sur
la base de 3000 actes par an, seuil porté à 150 € sur la base de 2000 actes.
d)
les
performances comparées :
la comparaison penche en faveur des
huissiers de Justice avec un taux de recouvrement de 12.1% pour les impôts et
19.3% pour les amendes, contre respectivement 9.3% et 15.1% pour les huissiers
du Trésor. Les délais d’instrumentation sont proches.
Pour le SIHTP, les conclusions de la
mission MAEC ne manquent pas d’intérêt, et nous comprenons mal pourquoi
elles sont restées si longtemps cachées ; nous ne sommes pas surpris des
résultats de la déconcentration des crédits de paiement qui ont abouti à une
responsabilisation des TPG en matière de paiement aux huissiers de Justice :
la période du « FAR WEST » que nous avions maintes fois dénoncée
est bien révolue.
Il n’en demeure pas moins que les résultats
des performances comparées sont manifestement faussés par les différences
dans les conditions d’intervention des huissiers de Justice, qui instrumentent
pour des sommes de petit montant plus faciles à recouvrer. Questionnée sur ce
point, la DGCP a affirmé ne pas tirer de conclusions de ces différences, qui
n’ont pas un caractère fondamental, mais plus probablement conjoncturel.
En revanche, nous tenons à souligner les
faiblesses méthodologiques qui tiennent à l’absence d’indicateurs fiables
de suivi des performances, et d’outils de mesure de rentabilité des actions
des huissiers faisant intervenir le montant des sommes récupérées, les coûts
d’intervention et les montants à recouvrer, ces carences étant elle mêmes
soulignées par les auteurs de l’étude.
Pour ces raisons, il faut espérer que
cette étude ne deviendra pas la bible de toute action future, mais servira
seulement à apporter un éclairage sur la situation du recouvrement
contentieux.
A la lumière des études menées, la
MAEC fait quelques préconisations, qui se situent sur trois axes :
- délimiter la répartition des tâches
entre HJ et HTP, où ces derniers se voient reconnaître leur priorité (quasi
exclusivité) en matière d’impôt, et pour tous les autres produits en phase
judiciaire, en particulier pour les montants supérieurs
à 150 €. En revanche, les HJ agissant dans le cadre de conventions, se
voient conforter dans leur rôle en phase comminatoire amiable.
- améliorer les outils techniques de
suivi de l’activité et améliorer le traitement informatique des dossiers.
- mieux répartir les effectifs
d’HTP entre les départements en tenant compte du nombre d’actes.
Il n’est certes pas contestable de
vouloir adapter, au fil des départs en retraite et des mutations, les effectifs
d’huissiers du Trésor au nombre d’actes à faire ; c’est une demande
de bon sens constante de notre syndicat, à qui la DGCP répliquait
jusqu’alors que ce critère était trop simple et devait être intégré à
d’autres paramètres…
Nous regrettons toutefois que les
huissiers de Justice soient devenus, par la faiblesse de notre direction générale
et la volonté du législateur (OTD), un recours obligé pour notre
administration, une parenthèse sous forme d’un circuit dans le privé qui
complique encore un peu plus le déroulement des procédures et les allonge,
sans aucun bénéfice ni pour le débiteur, ni pour notre administration.
Quant aux huissiers du Trésor, qui
interviennent après ATD, OTD, phase comminatoire diligentée par les huissiers
de Justice, leur action en matière de recouvrement effectif ne pourra pas être
très probante. En matière de poursuites, leur intervention sur le terrain
pourrait se borner, de plus en plus, à constater la carence du débiteur ;
dans ces conditions, il faudra définir de nouvelles missions, que le projet de
décret esquisse.
Ces derniers feront l’objet d’une
prochaine discussion, avant d’être finalisés ; rappelons qu’ils
serviront à définir l’attribution par le TPG de la part variable des primes.
Ils seront au nombre de quatre :
-
le
volume d’activité
-
les
délais de réalisation des poursuites
-
l’efficacité
des procédures
-
l’implication
personnelle et la participation à la politique des poursuites
Article 1. – Les inspecteurs du Trésor public auxquels sont attribuées, conformément aux dispositions de l’article 5 du décret du 2 août 1995 susvisé, les fonctions d’huissier, sont principalement chargés de procéder aux poursuites nécessaires au recouvrement des créances publiques dans les conditions prévues par l’article
L.258 du livre de procédures fiscales. Ils peuvent également se voir confier une activité complémentaire dans le domaine du recouvrement contentieux.
Ils sont habilités à effectuer toutes les formalités et assignations, ainsi qu’à signifier les actes nécessaires au recouvrement de toutes créances publiques.
Article 2. – Les agents visés à l’article 1er ci-dessus exercent leurs fonctions dans les conditions fixées par le trésorier-payeur général.
Ils informent les comptables pour le compte desquels ils instrumentent, et peuvent être amenés à apporter une assistance juridique à l’ensemble des comptables du département.
Article 3. – Les agents visés à l’article 1er ci-dessus sont commissionnés par le préfet du département de leur résidence et ne peuvent exercer leurs fonctions qu’après avoir justifié de leur prestation de serment.
Ils sont également astreints à fournir un cautionnement dont la nature et le montant sont fixés par les règlements en vigueur.
Article 4. – Lorsque les nécessités du service l’imposent, l’exercice des poursuites peut être confié par le trésorier-payeur général à des contrôleurs ou contrôleurs principaux du Trésor public.
Les intéressés conservent leur
affectation et continuent, dans l’intervalle de l’exercice des poursuites,
à assumer les fonctions qui leur sont normalement dévolues.
Ils sont soumis aux dispositions des articles 2 et 3 ci-dessus.
Article 5. – Le ministre de l’économie, des finances et de l’industrie, le ministre de la fonction publique et le ministre délégué au budget et à la réforme et l’Etat sont chargés, chacun en ce qui le concerne, de l’exécution du présent décret, qui sera publié au journal officiel de la République française.
On notera avec intérêt que l’Art. 1 définit
l’activité des inspecteurs chargés des fonctions d’huissier comme « principalement
chargés de procéder aux poursuites » et qu’ils pourront par ailleurs
« se voir confier une activité complémentaire dans le domaine du
recouvrement contentieux » et que l’Art 2 précise encore
« ils peuvent être amenés à apporter une assistance juridique à
l’ensemble des comptables ».
Il s’agit là manifestement d’une extension des compétences administratives des HTP qui va dans le sens d’une ouverture de leur activité et de la reconnaissance d’une technicité particulière en matière de poursuites ; l’huissier ne sera plus cantonné dans son activité de porteur d’actes, et on ne peut que s’en réjouir. En revanche, cette disposition permettra de manière évidente « d’occuper » les huissiers qui viendraient à se retrouver sans travail : si notre direction générale ne veut plus d’huissiers du Trésor « libéraux », elle ne veut pas davantage d’huissiers du Trésor « Club Med »